: Gustave Aimard
: Le Grand Chef des Aucas Tome II
: Books on Demand
: 9782322192656
: 1
: CHF 4.00
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: Hauptwerk vor 1945
: French
: 438
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Ce roman est paru la même année que Les trappeurs de l'Arkansas. Après avoir esquissé quelques-unes des aventures qu'il a vécues dans les prairies pendant les vingt années qu'il a passées parmi les tribus indiennes, Gustave Aimard se laisse emporter par le flot puissant de ses souvenirs. Nous faisons connaissance avec Valentin Guillois, héros récurrent que nous retrouverons dans les trois volumes qui suivent Le grand chef des Aucas.

Gustave Aimard est le pseudonyme de Olivier Gloux, romancier français né le 13 septembre 1818 à Paris où il est mort le 20 juin 1883.

XLVI. CURUMILLA.


Afin de bien expliquer au lecteur la disparition miraculeuse de doña Rosario, nous sommes obligé de faire quelques pas en arrière, et de retourner auprès de Curumilla, au moment où l’Ulmen, après sa conversation avec Trangoil Lanec, s’était mis comme un bon limier sur la piste des ravisseurs de la jeune fille.

 

Curumilla était un guerrier aussi renommé pour sa prudence et sa sagesse dans les conseils, que pour son courage dans les combats.

 

La rivière traversée, il laissa entre les mains d’un péon qui l’avait accompagné jusque-là, son cheval qui, non-seulement lui devenait inutile, mais encore qui aurait pu lui être nuisible en décelant sa présence par le bruit retentissant de ses sabots sur le sol.

 

Les Indiens sont des cavaliers émérites, mais ils sont surtout des marcheurs infatigables. La nature les a doués d’une force de jarrets inouïe, ils possèdent au plus haut degré la science de ce pas gymnastique relevé et cadencé que, depuis quelques années, nous avons, en Europe et particulièrement en France, introduit dans la marche des troupes.

 

Ils accomplissent avec une célérité incroyable des trajets que des cavaliers lancés à toute bride pourraient à peine fournir, coupant toujours en ligne droite, pour ainsi dire à vol d’oiseau ; sans tenir compte des difficultés sans nombre qui se dressent sur leur passage, aucun obstacle n’est assez grand pour entraver leur course.

 

Cette qualité, qu’eux seuls possèdent, les rend surtout redoutables aux Hispano-Américains, qui ne peuvent atteindre cette facilité de locomotion, et qui, en temps de guerre, les trouvent toujours devant eux au moment où ils s’y attendent le moins, et cela, presque toujours à des distances considérables des endroits où logiquement ils devraient être.

 

Curumilla, après avoir étudié avec soin les empreintes laissées par les ravisseurs, devina du premier coup la route qu’ils avaient prise et le lieu où ils se rendaient.

 

Il ne s’amusa pas à les suivre, ce qui lui aurait fait perdre beaucoup de temps ; au contraire, il résolut de les couper et de les attendre dans un coude qu’il connaissait et où il lui serait facile de les compter et peut-être de sauver la jeune fille.

 

Cette résolution arrêtée, l’Ulmen prit sa course.

 

Il marcha plusieurs heures sans se reposer, l’œil et l’oreille au guet, sondant les ténèbres, écoutant patiemment les bruits du désert.

 

Ces bruits qui, pour nous autres blancs, sont lettre morte, ont pour les Indiens, habitués à les interroger, chacun une signification spéciale à laquelle ils ne se trompent jamais ; ils les analysent, les décomposent et apprennent souvent par ce moyen des choses que leurs ennemis ont le plus grand intérêt à leur cacher.

 

Tout inexplicable que ce fait paraisse au premier abord, il est simple.

 

Il n’existe pas de bruit sans cause au désert.

 

Le vol des oiseaux, la passée d’une bête fauve, le bruissement des feuilles, le roulement d’une pierre dans un ravin, l’ondulation des hautes herbes, le froissement des branches dans les halliers, sont pour l’Indien autant d’indices précieux.

 

À un certain endroit qu’il connaissait, Curumilla se coucha à plat ventre sur le sol, derrière un bloc de rochers, et se confondit immobile avec les herbe