« A MADAME DE MORTSAUF. »
Combien de choses n’avais-je pas à vous dire en arrivant, auxquelles je pensais pendant le chemin et que j’oublie en vous voyant ! Oui, dès que je vous vois, chère Henriette, je ne trouve plus mes paroles en harmonie avec les reflets de votre âme qui grandissent votre beauté ; puis, j’éprouve près de vous un bonheur tellement infini, que le sentiment actuel efface les sentiments de la vie antérieure. Chaque fois, je nais à une vie plus étendue et suis comme le voyageur qui, en montant quelque grand rocher, découvre à chaque pas un nouvel horizon. A chaque nouvelle conversation, n’ajoutai-je pas à mes immenses trésors un nouveau trésor ? Là, je crois, est le secret des longs, des inépuisables attachements. Je ne puis donc vous parler de vous que loin de vous. En votre présence, je suis trop ébloui pour voir, trop heureux pour interroger mon bonheur, trop plein de vous pour être moi, trop éloquent par vous pour parler