: Thomas Hardy
: Tess d'Uberville
: Books on Demand
: 9782322441518
: 1
: CHF 3.50
:
: Erzählende Literatur
: French
: 618
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Tess, 20 ans, fille d'un couple misérable de paysans de la vallée de Blackmoor va connaître les vicissitudes de la vie. Un pasteur ayant convaincu son père, qu'il est issu d'une lignée de nobles, ce dernier et surtout sa femme, vont fantasmer sur cette éventualité. Tess est placée dans une famille de nouveaux riches où elle est séduite et abandonnée par Alec d'Urberville. L'enfant qu'elle met au monde meurt peu après. Lorsqu'elle tombe amoureuse d'Angel (et réciproquement), elle fait l'erreur de ne pas vouloir dissimuler ce fait. Dès lors son destin est une descente aux enfers de la honte et de la déchéance... Par des descriptions sobres et souvent poétiques, l'auteur nous peint, à travers l'histoire de Tess, les gestes simples des paysans (les moissonneurs, la traite des vaches), mais aussi les sentiments pleins de pudibonderie et de pharisianisme de l'époque, l'empire de la religion dans la vie de tous les jours (mort du bébé), et l'état d'ignorance dans lequel on maintenait les gens, surtout les femmes.

Thomas Hardy, né le 2 juin 1840 à Stinsford, à Dorchester, et mort le 11 janvier 1928 à Dorchester, est un poète et écrivain britannique appartenant au courant naturaliste. Auteur devenu aujourd'hui classique, il a tout particulièrement influencé D. H. Lawrence et John Cowper Powys.

I


Un soir de la fin de mai, un homme d’un certain âge s’en retournait à pied de Shaston au village de Marlott, dans le val voisin de Blackmoor. Ses jambes vacillantes le faisaient obliquer légèrement vers la gauche. De temps en temps il semblait, par un vigoureux hochement de tête, confirmer une opinion, bien qu’il ne pensât à rien en particulier. Un panier à œufs vide était suspendu à son bras ; le poil de son chapeau était tout hérissé et la marque du pouce se voyait sur le bord.

Il croisa un prêtre âgé, à califourchon sur une jument grise, qui, tout en chevauchant, fredonnait d’un air distrait.

– Bien le bonsoir, dit l’homme au panier.

– Bonsoir, sir John, dit le prêtre.

Le piéton fit un ou deux pas, s’arrêta, puis se retournant :

– Faites excuse, monsieur : mais au dernier jour de marché nous nous sommes rencontrés sur cette route, à peu près à cette heure-ci, et j’ai dit : Bonsoir, et vous m’avez répondu : Bonsoir, sir John, comme aujourd’hui.

– Oui, dit le prêtre.

– Et une autre fois, avant, il y a près d’un mois.

– Cela se peut.

– Alors, pourquoi donc que vous m’appeliez tout le temps sir John, quand je suis tout bonnement Jack Durbeyfield, le revendeur ?

Le prêtre approcha son cheval.

– C’était une simple lubie, dit-il ; puis, après un moment d’hésitation : – C’est une découverte que j’ai faite il y a peu de temps, en étudiant les généalogies pour la nouvelle histoire du comté. Je suis le pasteur Tringham, l’antiquaire de Stagfoot-Lane. Ignorez-vous vraiment, Durbeyfield, que vous êtes le représentant en ligne directe de la vieille famille des chevaliers D’Urberville, descendant du célèbre chevalier, sir Païen D’Urberville qui, d’après les archives de Battle-Abbey, vint de Normandie avec Guillaume le Conquérant ?

– C’est bien la première fois qu’on me le dit, monsieur !

– Mais, c’est vrai… Levez un instant le menton que je puisse mieux saisir votre profil. Oui, voilà le nez et le menton D’Urberville… un peu dégénérés. Votre ancêtre était un des douze chevaliers qui aidèrent le seigneur normand d’Estremavilla à conquérir le comté de Glamorgan. Plusieurs branches de votre famille ont possédé des manoirs dans toute cette région-ci. Leurs noms se trouvent dans les Rôles du Trésor, au temps du roi Étienne. Sous le règne du roi Jean, l’un deux était assez riche pour faire don d’une seigneurie aux Chevaliers Hospitaliers, et, au temps d’Édouard II, votre aïeul Brian fut convoqué à Westminster pour y assister au Grand Conseil. Après avoir un peu décliné à l’époque d’Oliver Cromwell, mais pas de façon sérieuse, sous le règne de Charles II vous fûtes nommés Chevaliers du Chêne-Royal pour votre loyalisme. Oui, il y eut parmi vous des générations de sir John, et si le titre de chevalier, comme celui de baronnet, était héréditaire, ainsi qu’au temps jadis où les chevaliers se succédaient de père en fils, vous aussi, vous seriez maintenant sir John.

– Pas possible !

– En un mot, con