V. Les fleurs cueillies et remplacées.
«Mon Dieu! mon Dieu! que je m'ennuie toute seule! pensa Marguerite après avoir marché un quart d'heure. Pourquoi donc Madeleine m'a-t-elle forcée de sortir?… Camille voulait bien me garder, je l'ai bien vu!… Quand je suis seule avec Camille, elle me laisse faire tout ce que je veux… Comme je l'aime, Camille!… J'aime beaucoup Madeleine aussi; mais… je m'amuse davantage avec Camille. Qu'est-ce que je vais faire pour m'amuser?… Ah! j'ai une bonne idée: je vais nettoyer et balayer leur petit jardin.»
Elle courut vers le jardin de Camille et de Madeleine, le nettoya, balaya les feuilles tombées, et se mit ensuite à examiner toutes les fleurs. Tout à coup l'idée lui vint de cueillir un beau bouquet pour Camille et pour Madeleine.
«Comme elles seront contentes! se dit-elle. Je vais prendre toutes les fleurs, j'en ferai un magnifique bouquet: elles le mettront dans leur chambre, qui sentira bien bon!»
Voilà Marguerite enchantée de son idée; elle cueille oeillets, giroflées, marguerites, roses, dahlias, réséda, jasmin, enfin tout ce qui se trouvait dans le jardin. Elle jetait les fleurs à mesure dans son tablier dont elle avait relevé les coins, les entassait tant qu'elle pouvait et ne leur laissait presque pas de queue.
Quand elle eut tout cueilli, elle courut à la maison, entra précipitamment dans la chambre où travaillaient encore Camille et Madeleine, et, courant à elles d'un air radieux:
«Tenez, Camille, tenez, Madeleine, regardez ce que je vous apporte, comme c'est beau!»
Et, ouvrant son tablier, elle leur fit voir toutes ces fleurs fripées, fanées, écrasées.
«J'ai cueilli tout cela pour vous, leur dit-elle: nous les mettrons dans notre chambre, pour qu'elle sente bon!»
Camille et Madeleine se regardèrent en souriant. La gaieté les gagna à la vue de ces paquets de fleurs flétries et de l'air triomphant de Marguerite; enfin elles se mirent