: Alexandre Dumas
: La San Felice version intégrale
: Books on Demand
: 9782322221684
: 1
: CHF 11.70
:
: Historische Romane und Erzählungen
: French
: 2224
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
« La San Felice » relate l'un des épisodes les plus étonnants des guerres de la Révolution française portant le « flambeau de la liberté » à travers l'Europe. En 1798, le général Championnet s'empare du royaume de Naples. Brève conquête qui se solde l'année suivante par la restauration du roi Ferdinand et de la reine Marie-Caroline au terme d'épisodes dont l'exactitude historique n'enlève rien au rocambolesque. Dumas, qui connaissait fort bien l'Italie et sa langue, entretenait avec Naples des relations passionnelles. En effet, son propre père, le général Dumas, avait été mêlé de très près aux événements : arrêté dans la baie de Naples sur le chemin du retour de la campagne d'Égypte, il y subit une détention si terrible qu'il ne survécut que peu de temps. Dumas, qui perdit à l'âge de quatre ans ce père adoré, est animé ici du souffle qui fait les grands chefs-d'oeuvre.

Alexandre Dumas, de son vrai nom Alexandre Davy de la Pailleterie est né à Villers-Cotterêts en 1802. La mort prématurée de son père, le général Dumas (1762-1806), le prive de la possibilité de faire des études supérieures. Obligé de travailler dès son plus jeune âge - il débute comme clerc de notaire - Alexandre Dumas tente sa chance à Paris en 1822. Il a alors vingt ans. Sa"belle plume" lui vaut d'être embauché dans les bureaux du duc d'Orléans. Il commence par publier quelques chroniques dans la presse. A partir de 1825, il écrit, en collaboration avec Adolphe de Leuven, des vaudevilles. Ceux-ci ne seront pas représentés. Alexandre Dumas s'essaye alors à des poèmes qu'il parvient à publier. Il rencontre des comédiens dont le tragédien Talma, qui l'encourage. Il découvre aussi le théâtre de Shakespeare à l'occasion d'une tournée en France de comédiens anglais. Il fréquente alors un groupe de jeunes écrivains animés par Charles Nodier. En 1828, Alexandre Dumas propose à la Comédie-Française, Christine, une tragédie en vers. La pièce sera présentée au comité de lecture mais ne sera pas jouée, en raison de la concurrence d'autres pièces traitant le même sujet. En 1829, Alexandre Dumas connaît un immense succès avec Henri III et sa cour, un drame historique, créé à Comédie-Française. La pièce vaut à Dumas de devenir l'une des figures de proue du théâtre romantique. Elle lui permet également d'acquérir argent et notoriété. Il écrit alors de nombreuses pièces, dont Antony (1831), La Tour de Nesle (1832), le Mari de la veuve (1832), Kean ou Désordre et Génie (1836), Caligula (1837).

I


La galère capitane


Entre le rocher auquel Virgile, en y creusant la tombe du clairon d’Hector, a imposé le nom de promontoire de Misène, et le cap Campanella, qui vit sur l’un de ses versants naître l’inventeur de la boussole, et sur l’autre errer proscrit et fugitif l’auteur de laJérusalem délivrée, s’ouvre le magnifique golfe de Naples.

Ce golfe, toujours riant, toujours sillonné par des milliers de barques, toujours retentissant du bruit des instruments et du chant des promeneurs, était, le 22 septembre 1798, plus joyeux, plus bruyant et plus animé encore que d’habitude.

Le mois de septembre est splendide à Naples, placé qu’il est entre les ardeurs dévorantes de l’été et les pluies capricieuses de l’automne ; et le jour duquel nous datons les premières pages de notre histoire était un des jours les plus splendides du mois. Le soleil ruisselait en flots dorés sur ce vaste amphithéâtre de collines qui semble allonger un de ses bras jusqu’à Nisida et l’autre jusqu’à Portici, pour presser la ville fortunée contre les flancs du mont Saint-Elme, que surmonte, pareille à une couronne murale posée sur le front de la moderne Parthénope, la vieille forteresse des princes angevins.

Le golfe, immense nappe d’azur, pareil à un tapis semé de paillettes d’or, frissonnait sous une brise matinale, légère, balsamique, parfumée ; si douce, qu’elle faisait éclore un ineffable sourire sur les visages qu’elle caressait ; si vivace, que dans les poitrines gonflées par elle se développait à l’instant même cette immense aspiration vers l’infini, qui fait croire orgueilleusement à l’homme qu’il est, ou du moins qu’il peut devenir un dieu, et que ce monde n’est qu’une hôtellerie d’un jour, bâtie sur la route du ciel.

Huit heures sonnaient à l’église San-Ferdinando, qui fait le coin de la rue de Tolède et de la place San-Ferdinando.

Le dernier frissonnement du timbre qui mesure le temps s’était à peine évanoui dans l’espace, que les mille cloches des trois cents églises de Naples bondissaient joyeusement et bruyamment par les ouvertures de leurs campaniles, et que les canons du fort de l’Œuf, du Castel-Nuovo et del Carmine, éclatant comme un roulement de tonnerre, semblaient vouloir éteindre leurs bruyantes volées, tout en enveloppant la ville d’une ceinture de fumée, tandis que le fort Saint-Elme, flamboyant et nuageux comme un cratère en éruption, improvisait, en face de l’ancien volcan muet, un Vésuve nouveau.

Cloches et canons saluaient de leur voix de bronze une magnifique galère qui en ce moment se détachait du quai, traversait le port militaire, et, sous la double pression des rames et de la voile, s’avançait majestueusement vers la haute mer, suivie de dix ou douze barques plus petites, mais presque aussi magnifiquement ornées que leur capitane, laquelle eût pu le disputer en richesse auBucentaure, menant le doge épouser l’Adriatique.

Cette galère était commandée par un officier de quarante-six à quarante-sept ans, vêtu du riche uniforme d’amiral de la marine napolitaine ; son visage mâle, d’une beauté sévère et impérative, était hâlé tout à la fois par le soleil et par le vent ; quoiqu’il eût la tête découverte en signe de respect, il portait haut son front, chargé de cheveux grisonnants à travers lesquels on devinait qu’avait dû passer plus d’une fois le souffle aigu de la tempête, et l’on comprenait à la première vue que c’était à lui, quels que fussent les illustres personnages qu’il portait à son bord, que le commandement était départi ; le porte-voix de vermeil suspendu à sa main droite eût été le signe visible de ce commandement, si la nature n’eût pris soin d’imprimer ce signe d’une façon bien autrement indélébile dans l’éclair de ses yeux et dans l’accent de sa voix.

Il s’appelait François Caracciolo et appartenait à cette antique famille des princes Caraccioli, accoutumés d’être les ambassadeurs des rois et les amants des reines.

Il se tenait debout sur son banc de quart, comme il eût fait un jour de combat.

Tout le tillac de la galère était recouvert par une tente de pourpre, blasonnée des armes des Deux-Siciles et destinée à garantir du soleil les augustes passagers qu’elle abritait.

Ces passagers formaient trois groupes, de pose et d’aspect différents.

Le premier de ces groupes, le plus considérable de tous, se composait de cinq hommes, occupant le centre du bâtiment, et dont trois débordaient de la tente sur le pont ; des rubans de toutes couleurs soutenaient à leur cou des croix de tous les pays, et leurs poitrines, chamarrées de plaques, étaient sillonnées de cordons. Deux d’entre eux portaient, comme marques distinctives de leur rang, des clefs d’or aux boutons de taille de leur habit ; ce qui signifiait qu’ils avaient l’honneur d’être chambellans.

Le personnage prin