: Marie Prat
: Plume Libre Editions
: Et si un clic pouvait changer le monde? Reset World
: Editions Plume Libre
: 9782492126147
: 1
: CHF 5.40
:
: Fantasy
: French
: 224
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Et si un clic pouvait changer le monde ? Un monde numérisé à outrance, un Enfant étrange, un Chat millénaire et connecté, une Dame qui traverse les mondes, c'est le décor de cette histoire qui va bien au-delà du temps et de l'espace. Un cataclysme inédit offre à l'enfant une chance unique de réinitialiser la planète. Voilà le défi à relever pour une humanité au bord du gouffre ! Va-t-il le faire ?

Marie PRAT est une professionnelle du numérique depuis plus de 25 ans. De ses expériences personnelles et professionnelles, de son engagement, de sa sensibilité particulière et de son goût marqué pour l'écriture depuis toujours, Marie PRAT, globe-trotter dans l'âme et citoyenne du monde, nous propose ici son premier roman : Suspense et espoir garantis !

Chapitre 2 : L’Enfant


Vers une nouvelle humanité ?


L’Enfant est de ceux-là.

C’est un Enfant aux cheveux bruns toujours en bataille, incoiffable ; l’Enfant est mince sans être frêle, pas très grand, pas petit non plus.

Il porte des vêtements gris, noirs et blancs dont il superpose les couches à loisirs, et prend grand soin chaque jour d’ajouter un petit accessoire de couleur vive : le jaune et l’orange sont ses couleurs préférées.

Il a de grands yeux sombres, avec une mélancolie dans le regard qui attire la sympathie, qui interroge aussi.

Il se meut lentement, délicatement, comme s’il avait peur d’abîmer le sol et ce qu’il y a dessus.

Il ne connait pas les jeux vidéo en vogue, ni les stars ou célébrités de son époque, et à vrai dire il s’en moque sans oser le dire trop fort, il est timide et ne veut pas froisser ses camarades. Il n’est pas à son aise dans les groupes, encore moins dans la foule. Il se trouve très bien dans les espaces où il se sent libre, libre de divaguer sans contraintes.

Les Enfants de son âge recherchent sa compagnie mais le trouvent en même temps un peu étrange, différent. Il ne partage pas avec eux ses temps de loisirs, il préfère se balader avec le Chat, ou seul.

C’est un Enfant à la fois réfléchi et rêveur, attentif à ses semblables, naturellement sympathique dans un monde qui l’est peu et de moins en moins. Il a une qualité extrêmement rare dans ce monde numérique, comme dans le monde d’avant : il sait écouter et il prend plaisir à le faire.

Il a compris très tôt que les humains, sous prétexte d’échanger, de communiquer, n’aiment rien de plus que parler d’eux-mêmes, de leurs grands malheurs et de leurs petits bonheurs, ou l’inverse de temps en temps, toujours en quête d’une oreille qu’ils espèrent attentive et empathique.

Il vit dans un monde ultra-connecté dans lequel on poste sur internet à longueur de journée pour se sentir exister, son père lui a expliqué cela.

C’est d’ailleurs ce qui a fait l’immense succès des réseaux sociaux du début du millénaire. Les internautes peuvent s’étendre sur leurs propres cas, raconter leur vie à loisir, l’enjoliver ou la noircir, se répandre sur leurs états d’âme et leurs traumatismes bénins, essayer de se faire plaindre ou de se faire pardonner, exposer leur image au monde entier et attendre les Like, poster des vidéos pour se mettre en valeur ou se moquer de leurs congénères, insulter à loisir en toute impunité, se faire des amis et des ennemis en un clic, se construire leur légende personnelle.

Leur ego s’en donne à cœur joie et se satisfait lui-même : c’est tout ce qui compte.

Avec les réseaux sociaux dit le père, les gens ont l’impression tout d’un coup d’exister, de partager, de communiquer. Ils s’exposent, expriment leurs colères, leurs joies, leurs peines à l’aide de smileys, de like, de photos, de vidéos, de phrases « textotées ».

Ils étalent leurs vies au grand jour et les plateformes recueillent beaucoup trop facilement des informations qui feront d’eux de parfaites cibles marketing.

Cette gratuité apparente a fait les beaux jours des GAFAM. Les utilisateurs ont mis des dizaines d’années à s’apercevoir de la supercherie et de l’arnaque : le produit maintenant, c’est eux !

Ils voient ce qu’on veut leur montrer.

Longtemps ils n’ont pas voulu comprendre qu’ils étaient les dindons de la farce, que leurs informations personnelles, leurs désirs exprimés à longueur de post étaient pompés dans des big data, tout cela faisant ensuite d’eux des proies faciles, des consommateurs captifs.

Quand l’Enfant se met à parler, c’est avec un langage riche des centaines de livres qu’il a déjà lus à son âge, riche des innombrables voyages qu’il a réalisés dans sa tête.

Les gens l’écoutent parce qu’il utilise un langage très étonnant pour ses neuf ans. Il n’est ni érudit, ni surdoué mais il aime les mots, il sait les choisir et prend plaisir à le faire.

L’Enfant, comme des milliards d’autres, sait que le monde ne tourne pas rond, qu’il n’a jamais tourné rond.

C’est pour lui une certitude, et il n’en a pas beaucoup des certitudes…. A vrai dire c’est la seule qu’il ait à ce stade.

Ce qu’il ne soupçonne pas encore, c’est qu’il pourra peut-être y remédier, à la façon d’un colibri.

L’Enfant a beaucoup aimé cette histoire du petit colibri qui « fait sa part », que lui a raconté sa mère quand il était tout petit.

Les élites contemporaines, partout sur la planète sont des personnes sur-éduquées, hyper cultivées, voire brillantes mais pour la plupart « coincées » dans une vision du monde obsolète qui les rassure, même s’ils répètent à loisir que le monde est à la veille d’un grand changement de civilisation.

L’Enfant sait, du haut de ces neuf ans, que l’être vaut bien mieux que l’avoir, qu’une course effrénée vers plus de croissance, plus de progrès technique, plus de pouvoir d’achat, n’apportera pas le bonheur, ne rendra les hommes ni meilleurs, ni plus sages.

Il sait que les âmes sont malades, il perçoit leur couleur, leur douleur et leur douceur parfois.

C’est comme une pandémie planétaire. Il faut guérir les âmes, les libérer de la prison dans laquelle elles se sont enfermées.

Les âmes sont malades et il faut les reconnecter au monde, au vrai. L’Enfant garde au fond de son cœur ce message qu’une petite voix lui a susurré il y a longtemps. Pour l’instant il ne sait pas quoi en faire, il y réfléchit souvent.

Comme il est accro aux actualités, il les consulte plusieurs fois par jour, les scrute pendant des heures, y cherche un signal fort ou même faible de bouleversement du monde.

Il se souvient de cet article sur sa famille 4.0 portée en exergue dans un journal national, ses parents en étaient très fiers et avaient posté l’article sur le réseau social à la mode en ce temps-là.

L’Enfant est né dans le « Tout numérique » : maison connectée, objets connectés, des écrans partout, des animaux robots, que ses parents trouvent plus propres et plus pratiques que les animaux à poils ou à plumes….

- Le frigo dit ce qu’il faut manger et réapprovisionner,

- La télé ce qu’il faut regarder et comprendre,

- Le téléphone ce qu’il faut faire et quand,

- La montre comment on va et comment se soigner,

- La voiture où il faut aller et comment y aller,

- Le professeur virtuel ce qu’il faut apprendre et ce qu’il faut savoir.

Il y a dans la maison des robots partout et pour tout : des robots hommes de ménage, des robots serveurs, des robots répétiteurs, des robots tondeurs de pelouse, des robots coiffeurs, des robots comptables, des robots régulateurs, des robots lecteurs, des robots musiciens, des robots cuisiniers...

Ils sont plus nombreux que les humains dans la maison comme sur la planète.

Les objets du quotidien sont tous plus intelligents les uns que les autres, faisant fi de la stupidité archaïque des êtres biologiques.

Une salle de repos a d’ailleurs été aménagée pour eux avec soin dans la maison, le droit international des robots recommandant des périodes de repos hebdomadaires pour le bien être de ces êtres artificiellement intelligents.

L’Enfant apprend ce qu’il faut savoir avec ses e-instituteurs. Il va tout de même une ou deux fois par semaine en classe. Le lieu change chaque semaine mais se déplacer n’est plus un problème, chacun dispose de son drone solaire.

Il assiste à des cours collectifs de méditation et « d’harmonisation de la vie sur terre », dispensés par des sages, chamanes des temps modernes. Il se trouve d’ailleurs assez doué pour ses deux matières (en toute humilité), ce n’est pas le cas de tous ces camarades.

Certains, trop autocentrés, trop enclins à la compétition, font et refont sans cesse les mêmes cours dans l’espoir de progresser…

Les pédagogues ne se découragent jamais. Des adultes assistent aussi à...