Chapitre deuxième
L’ÎLE SANS NOM
Affolés, malgré leur sang-froid, par le naufrage de leur hydravion, Bert et Marcel n’avaient d’abord pas remarqué qu’ils étaient beaucoup moins secoués depuis le second choc. Ce ne fut qu’au bout de quelques secondes qu’ils constatèrent cette différence.
La tempête ne décroissait pourtant pas d’intensité. À gauche, les vagues se soulevaient toujours aussi monstrueusement, mais à droite elles étaient beaucoup moins hautes ; par comparaison, la mer semblait presque calme.
Ils en déduisirent qu’une terre se trouvait sinon tout près, du moins à une certaine distance de là. Cela ne pouvait être qu’une île qu’ils étaient pour l’heure incapables d’identifier. Cette île, de formation volcanique, s’entourait d’une ceinture de récifs sur lesquels l’hydravion venait de déchirer sa coque.
Il s’enfonçait un peu moins vite, mais sans arrêt. L’eau filtrait dans la carlingue, ils en avaient déjà jusqu’à mi-jambe. Dans dix minutes au maximum, l’appareil aurait disparu. Il était entièrement métallique, et le carburant que contenaient ses réservoirs, et dont ils n’avaient pas voulu se débarrasser, l’alourdissait considérablement.
À la condition de crier, ils pouvaient se parler. Bert mit ses mains en cornet autour de sa bouche pour vociférer :
— Il doit y avoir une île !
— Je le crois ! fit Marcel sur le même ton, mais on ne la voit pas…
— Il faut essayer de l’atteindre.
— C’est mon avis. Plongeons et en avant !…
Cette impétuosité n’obtint pas l’assentiment de l’Américain.
— Gonflons d’abord nos canots, conseilla-t-il, faisons comme monsieur Brown.
Car il gratifiait toujours le nègre du titre de monsieur, de la façon la plus méprisante.
— … Nos berthons nous permettront d