: Alexandre Dumas
: Récits fantastiques
: Books on Demand
: 9782322134540
: 1
: CHF 2.20
:
: Krimis, Thriller, Spionage
: French
: 174
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
-Histoire d'un mort racontée par lui-même : Trois amis sont dans un atelier la nuit et l'un des trois, qui est médecin, raconte une histoire qu'il jure lui être arrivée. Un beau soir, il est appelé au chevet d'une femme magnifique qui souffre en fait d'un chagrin d'amour. Il en tombe éperdument amoureux mais meurt brutalement. -Un dîner chez Rossini : Alors qu'Alexandre Dumas dîne chez le célèbre compositeur, à Bologne, un convive lui raconte une étrange histoire de revenants, arrivée à l'un de ses ancêtres. Deux jeunes gens, Beppo de Scamoza et Gaetano Ramonoli, étudiants résidant à Bologne, qui semblent opposés en tous points (et de physique et de situation), sont unis par une indéfectible amitié. Alors qu'un soir ils rentrent d'un duel et sont donc sous le coup d'une forte émotion, ils se jurent une amitié éternelle, par delà la mort. -Le lièvre de mon grand-père : Alors que des amis de Dumas logent dans une auberge, leur hôte leur raconte cette histoire, qui est celle de son grand-père. Ce dernier, qui se nomme Jérôme Palan, est apothicaire à Theux. Bon vivant, il est aimé de tous et n'a qu'un seul ennemi, Thomas Pichet, garde-chasse, qui lui reproche d'avoir épousé la femme qu'il convoitait. Palan a deux passions: la science qui l'a rendu impie, et la chasse qui prend le pas sur son travail et l'enhardit au point d'aller taquiner le gibier sur les terres privées.

Alexandre Dumas, de son vrai nom Alexandre Davy de la Pailleterie est né à Villers-Cotterêts en 1802. La mort prématurée de son père, le général Dumas (1762-1806), le prive de la possibilité de faire des études supérieures. Obligé de travailler dès son plus jeune âge - il débute comme clerc de notaire - Alexandre Dumas tente sa chance à Paris en 1822. Il a alors vingt ans. Sa"belle plume" lui vaut d'être embauché dans les bureaux du duc d'Orléans. Il commence par publier quelques chroniques dans la presse. A partir de 1825, il écrit, en collaboration avec Adolphe de Leuven, des vaudevilles. Ceux-ci ne seront pas représentés. Alexandre Dumas s'essaye alors à des poèmes qu'il parvient à publier. Il rencontre des comédiens dont le tragédien Talma, qui l'encourage. Il découvre aussi le théâtre de Shakespeare à l'occasion d'une tournée en France de comédiens anglais. Il fréquente alors un groupe de jeunes écrivains animés par Charles Nodier. En 1828, Alexandre Dumas propose à la Comédie-Française, Christine, une tragédie en vers. La pièce sera présentée au comité de lecture mais ne sera pas jouée, en raison de la concurrence d'autres pièces traitant le même sujet. En 1829, Alexandre Dumas connaît un immense succès avec Henri III et sa cour, un drame historique, créé à Comédie-Française. La pièce vaut à Dumas de devenir l'une des figures de proue du théâtre romantique. Elle lui permet également d'acquérir argent et notoriété. Il écrit alors de nombreuses pièces, dont Antony (1831), La Tour de Nesle (1832), le Mari de la veuve (1832), Kean ou Désordre et Génie (1836), Caligula (1837).

Un dîner chez Rossini


I


Un dîner chez Rossini


En 1840, je retournais en Italie pour la troisième ou quatrième fois, et j’étais chargé par mon bon ami Denniée, l’inspecteur aux revues, de porter un voile de dentelle à madame Rossini, qui habitait Bologne avec l’illustre compositeur, auquelle Comte Ory etGuillaume Tell ont donné des lettres de naturalisation française.

Je ne sais si, après moi, il restera quelque chose de moi ; mais, en tout cas et à tout hasard, j’ai pris cette pieuse habitude, tout en oubliant mes ennemis, de mêler le nom de mes amis, non seulement à ma vie intime, mais encore à ma vie littéraire. De cette façon, au fur et à mesure que j’avance vers l’avenir, j’entraîne avec moi tout ce qui a eu part à mon passé, tout ce qui se mêle à mon présent, comme ferait un fleuve qui ne se contenterait pas de réfléchir les fleurs, les bois, les maisons de ses rives, mais encore qui forcerait de le suivre jusqu’à l’océan l’image de ces maisons, de ces bois et de ces fleur.

Aussi, ne suis-je jamais seul tant qu’un livre de moi reste près de moi. J’ouvre ce livre. Chaque page me rappelle un jour écoulé, et ce jour renaît à l’instant de son aube à son crépuscule, tout vivant des mêmes émotions qui l’ont rempli, tout peuplé des mêmes personnages qui l’ont traversé. Où étais-je ce jour-là ? Dans quel lieu du monde allais-je chercher une distraction, demander un souvenir, cueillir une espérance, bouton qui se fane souvent avant d’être éclos, fleur qui s’effeuille souvent avant d’être ouverte ? Visitais-je l’Allemagne, l’Italie, l’Afrique, l’Angleterre ou la Grèce ? Remontais-je le Rhin, priais-je au Colisée, chassais-je dans la Sierra, campais-je au désert, rêvais-je à Westminster, gravais-je mon nom sur le tombeau d’Archimède ou sur le rocher des Thermopyles ? Quelle main a touché la mienne ? Est-ce celle d’un roi assis sur son trône ? Est-ce celle d’un pâtre gardant son troupeau ? Quel prince m’a appelé son ami ? Quel mendiant m’a appelé son frère ? Avec qui ai-je partagé ma bourse le matin ? Qui a rompu son pain avec moi le soir ? Quelles sont depuis vingt ans les heures heureuses notées à la craie, les heures sombres marquées au charbon ?

Hélas ! le meilleur de ma vie est déjà dans mes souvenirs, je suis comme un de ces arbres au feuillage touffu, pleins d’oiseaux, muets à midi, mais qui se réveilleront vers la fin de la journée, et qui, le soir venu, empliront ma vieillesse de battements d’ailes et de chant ; ils l’égaieront ainsi de leur joie, de leurs amours et de leurs rumeurs, jusqu’à ce que la mort touche à son tour l’arbre hospitalier, et que l’arbre en tombant effarouche tous ces bruyants chanteurs, dont chacun ne sera autre chose qu’une des heures de ma vie.

Et voyez comme un seul nom vient de me faire dévier de ma route, et m’a jeté de la réalité dans le rêve. Cet ami, qui m’avait chargé de remettre ce voile est mort depuis. C’était un esprit charmant, un inépuisable et gai conteur, avec lequel j’ai passé bien des soirées chez mademoiselle Mars, autre esprit charmant sur lequel la mort a soufflé aussi, et qui s’est éteint comme se serait éteinte une étoile dans le ciel de ma vie.

J’allais à Florence, c’était le terme de mon voyage ; mais, au lieu de m’arrêter là, j’eus l’idée de pousser jusqu’à Bologne et de faire ma commission en digne messager, c’est-à-dire en remettant moi-même le voile aux belles mains auxquelles il était destiné.

C’était trois jours pour aller, trois jours pour revenir, plus un jour de halte, en tout sept jours, sept jours de travail dépensés, perdus. Mais, ma foi ! j’allais revoir Rossini, Rossini qui sans doute venait de s’exiler de peur de céder à la tentation de faire quelque nouveau chef-d’œuvre.

Je me souviens que ce fut vers le soir que j’arrivai en vue de Bologne. La ville semblait de loin noyée dans une vapeur au-dessus de laquelle s’élevait, se détachant sur le fond sombre de l’Apennin, la cathédrale de Saint-Pierre, et ces deux rivales de la tour penchée de Pise, la Garizenda et l’Asinelli. De temps en temps le soleil, au moment de se coucher, lançait un dernier rayon qui enflammait les vitres de quelques palais, comme si les chambres de ces palais étaient pleines de flammes ; tandis que la petite rivière du Reno, nuancée de toutes les couleurs du ciel qu’elle réfléchissait, se tordait dans la plaine comme un ruban de moire argentée ; mais peu à peu le soleil s’abaissa derrière la montagne ; les vitres, étincelantes d’abord, s’éteignirent peu à peu. Le Reno prit la teinte plombée de l’étain ; puis vint la nuit rapide, enveloppant la ville dans ses voiles noirs, que trouèrent bientôt mille lumières de points aussi lumineux que ceux qui brillaient au ciel.

Il était dix heures du soir quand j’entrai avec toute maroba dans l’auberge desTrois-Rois.

Mon premier soin fut d’envoyer ma carte à Rossini, qui me fit répondre qu’à partir de ce moment son palais était à ma disposition. Le lendemain à onze heures j’étais chez lui.

Le palais Rossini est comme tous les palais italiens, un composé de colonnes de marbre, de fresques et de tableaux. Le tout spacieux à y faire danser trois ou quatre maisons françaises, bâti pour l’été, jamais pour l’hiver, c’est-à-dire plein d’air, d’ombre, de fraîcheur, de roses et de camélias.

En Italie,