X Le Lazzarone et l'Anglais.
Il y avait à Naples en même temps que moi et dans le même hôtel que moi un de ces Anglais quinteux, flegmatiques, absolus, qui croient l'argent le mobile de tout, qui se figurent qu'avec de l'argent on doit venir à bout de tout, enfin pour qui l'argent est l'argument qui répond à tout.
L'Anglais s'était fait ce raisonnement: Avec mon argent, je dirai ce que je pense; avec mon argent, je me procurerai ce que je veux; avec mon argent, j'achèterai ce que je désire. Si j'ai assez d'argent pour donner un bon prix de la terre, je verrai après cela à marchander le ciel.
Et il était parti de Londres dans cette douce illusion. Il était venu droit à Naples par le bateau à vapeur the Sphinx. Une fois à Naples, il avait voulu voir Pompéia; il avait fait demander un guide; et comme le guide ne se trouvait pas là sous sa main à l'instant même où il le demandait, il avait pris un lazzarone pour remplacer le guide.
En arrivant la veille dans le port, l'Anglais avait éprouvé un premier désappointement: le bâtiment avait jeté l'ancre une demi-heure trop tard pour que les passagers pussent descendre à terre le même soir. Or, comme l'Anglais avait eu constamment le mal de mer pendant les six jours que le bâtiment avait mis pour venir de Porsmouth à Naples, ce digne insulaire avait supporté fort impatiemment cette contrariété. En conséquence, il avait fait offrir à l'instant même cent guinées au capitaine du port; mais comme les ordres sanitaires sont du dernier positif, le capitaine du port lui avait ri au nez; l'Anglais alors s'était couché de fort mauvaise humeur, envoyant à tous les diables le roi qui donnait de pareils ordres et le gouvernement qui avait la bassesse de les exécuter.
Grâce à leur tempérament lymphatique, les Anglais sont tout particulièrement rancuniers; notre Anglais conservait donc une dent contre le roi Ferdinand; et, comme les Anglais n'ont pas l'habitude de dissimuler ce qu'ils pensent, il déblatérait tout en suivant la route de Pompéia, et dans le plus pur italien que pouvait lui fournir sa grammaire de Vergani, contre la tyrannie du roi Ferdinand.
Le lazzarone ne parle pas italien, mais le lazzarone comprend toutes les langues. Le lazzarone comprenait donc parfaitement ce que disait l'Anglais, qui, par su